Julie Donot : « L’ardoise est un matériau qui a toute sa place dans l’architecture moderne »
Julie Donot et Philippe Coupain composent ensemble l’Atelier d’Architecture Durable. Lors d’un récent entretien, les deux architectes nous livrent leur vision sur les dernières tendances dans la construction et l’urbanisme. Ils nous expliquent également combien et en quoi l’ardoise naturelle est un matériau idéal et correspondant parfaitement à notre époque.
CUPA PIZARRAS – Qu’est-ce qu’un habitat durable aujourd’hui ?
Julie Donot – C’est un habitat qui est performant d’un point de vue énergétique en permettant une utilisation rationnelle de l’énergie pour ses besoins en chauffage, en électricité ou en eau.
C’est aussi un habitat qui utilise des matériaux exigeant peu ou pas d’entretien dans le temps. Selon les cas, ces matériaux seront également naturels ou non, locaux ou non. En revanche, c’est un habitat qui doit permettre de répondre et d’anticiper l’évolution de la vie de ses occupants dans la durée, notamment par une conception évolutive ou un aménageable des lieux.
CP – Dans votre expérience, est-ce que les clients sont plus préoccupés par la durabilité qu’il-y-a quelques années ?
JD – D’un point de vue énergétique et entretien des matériaux je dirais que oui bien que les préjugés en matière de bâtiments passifs ont parfois encore la vie dure, du style « on ne peut pas ouvrir les fenêtres », « c’est un bâtiment qui ne respire pas » …
CP – De plus en plus, on entend parler de la maison passive. C’est quoi un bâtiment passif ? Quelle est votre opinion sur cette tendance ?
JD – Par définition, un bâtiment passif c’est un bâtiment dont les besoins en chauffage sont inférieurs à 15 kWh par m² et par an. En d’autres termes, c’est un bâtiment dont les besoins en chauffage sont tellement faibles qu’un système de chauffage central « traditionnel » devient démesuré pour le bâtiment. Cela ne veut pas dire pour autant que ces besoins sont nuls mais ceux-ci sont compensés par un système de ventilation avec récupération de chaleur, par des apports solaires, par un système de chauffage d’appoint ou par les gains internes…
Malgré les normes énergétiques en vigueur pour les bâtiments neufs (PEB) (Pour la vente ou la location d’une habitation, la Belgique impose un certificat de Performance Energétique des Bâtiments : PEB en Wallonie / EPC en Flandre) il faut selon moi encore insister pour faire prendre conscience qu’il est préférable d’investir prioritairement dans une diminution des besoins d’un bâtiment par une isolation extrêmement performante plutôt que de recourir à des techniques sophistiquées et souvent onéreuses de production de chauffage.
CP – Quelle est la place de l’ardoise dans l’architecture moderne ?
JD – Personnellement je trouve que c’est un matériau qui a toute sa place dans l’architecture moderne dans le sens où c’est un matériau qui présente une excellente longévité. Utilisé en bardage, l’ardoise permet une isolation conséquente derrière celui-ci sans retrouver une épaisseur de paroi démesurée.
De plus, par sa tonalité et son aspect intemporel, l’ardoise s’accorde avec bon nombre d’autres matériau, contemporain ou non, et peut facilement être mis en œuvre, sans technique ou moyen remarquables.
CP – Quelles sont les caractéristiques que vous cherchez quand vous utilisez de l’ardoise dans un projet ?
JD – Les différentes caractéristiques énumérées ci-dessus sont le début de la réponse. J’ajouterais que c’est aussi car l’ardoise permet également une intégration dans le paysage bâti environnant ou vis-à-vis de bâtiments plus anciens.
CP – La Belgique a une longue tradition d’ardoise naturelle, mais y a-t-il des différences entre les régions ?
JD – En couverture de toiture, elle est d’avantage prépondérante en Wallonie qu’en Flandre où elle a plutôt été réservée aux édifices anciens remarquables. Dans les Ardennes, elle a déjà une place non négligeable en matière de bardage et qui, à mon sens, demande encore à se développer pour le reste de la Wallonie surtout en matière d’architecture contemporaine grâce aux récents modes de poses horizontaux ou aléatoires.
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