Tribune Libre : François Jeanneau, Inspecteur Général des Monuments Historiques, evoque l’ardoise
Il n’y a pas une région de France où l’on ne trouve pas de toitures réalisées avec cette pierre si particulière par sa couleur, sa forme, sa texture. Elle a tellement imprimé et non imprimée nos paysages dans des régions aussi différentes les unes que les autres qu’on avait pris l’habitude de l’admirer sur les plus prestigieux de nos monuments ou sur les plus modestes de nos bâtis anciens sans même se poser la question de sa provenance.
Certes, l’extraction de ce beau matériau s’est faite souvent localement dans les Ardennes, dans les Pyrénées, dans le Massif central, en Bretagne, en Normandie jusqu’à ce que la production angevine, existante depuis au moins le XVème siècle, date à laquelle elle s’est généralisée sur les grandes demeures seigneuriales et royales, envahisse le territoire grâce notamment à l’expansion française du chemin de fer.
Tant et si bien que lorsqu’on a commencé à parler de la fin de l’extraction des Ardoisières d’Angers-Trélazé voici quelques mois, les architectes du Patrimoine que nous sommes se trouvèrent fort démunis, habitués à une qualité telle qu’on la prescrivait sans même s’en inquiéter.
Mais nous voici désormais revenu à la case départ où la question du choix du matériau et de sa provenance parmi les nombreuses exploitations étrangères à notre pays, se pose d’une manière prépondérante dans nos prescriptions.
La production de CUPA PIZARRAS, cette belle ardoise espagnole, semble donc répondre à nos cruelles interrogations quand il faut à la fois conserver des critères de qualité, fondamentaux sur un monument historique classé puisque nos travaux de restauration sont réputés y durer au moins cent ans, mais également maintenir la couleur et la texture afin de rester dans la continuité esthétique de ce qui s’est toujours fait dans notre pays, tout en s’intégrant au mieux dans le paysage environnant, urbain ou naturel.
Nous avons trouvé chez CUPA PIZARRAS cette exigence. La visite que nous avons réalisée en Espagne de ses carrières, de ses méthodes de production nous a rassuré. Nous y retrouvons l’esprit et la manière qui animaient depuis de nombreuses années les Ardoisières d’Angers-Trélazé, y compris dans la récupération des anciennes machines à épaufrures manuelles dont le résultat une fois l’ardoise posée, nous importe tant.
Un beau matériau est donc à notre disposition et à celle des couvreurs. Il reste évidemment à ces derniers de conserver les savoir-faire traditionnels afin de le mettre en oeuvre dans l’absolu respect de ses techniques spécifiques de pose. Car c’est un tout : de l’extraction au bâtiment, une belle toiture se reconnaît jusqu’en ces moindres détails.
Nous nous félicitons que CUPA PIZARRAS sache maintenir ces exigences et que l’ardoise que l’on va désormais poser sur notre Patrimoine bâtis, reste un matériau européen provenant d’une strate géologique identique à feu nos productions françaises.
Evitons de la sorte à nos enfants de contempler des monuments tellement dénaturés par des choix inconsidérés qu’ils ne seront alors plus que l’ombre d’eux-mêmes.